L’ancienne écriture Hán Nôm vietnamienne
L’ancienne écriture Hán Nôm vietnamienne: Le Hán Nôm est l’alphabet vietnamien inspiré du chinois. Aujourd’hui quasi-oublié, il est pourtant un précieux témoin de l’histoire. Rencontre avec ceux qui tentent de lui redonner de la voix.
En dépit de son âge avancé, le professeur Trân Nghia n’a cessé ses activités professionnelles. Il traduit régulièrement des livres et divers documents, rédige ouvrages et articles de magazine, et part souvent en mission dans le cadre de programmes de coopération, au Vietnam comme à l’étranger.
Il s’intéresse à tout ce qui est lié au Hán Nôm, du lexique aux scénarios de tuông (théâtre musical classique), en passant par l’écriture sino-vietnamienne. «Je m’occupe actuellement de 42 scenarii de +tuông+ en Nôm que la British Library a offerts à la Bibliothèque des sciences générales de Hô Chi Minh-Ville. Je veux inciter les jeunes à les traduire. Au-delà de la préservation d’une écriture ancienne, ce travail contribuera à faire renaître des pièces oubliées», confie-t-il.
Fin 2012, la Fondation de conservation du Nôm (The Vietnamese Nôm Preservation Foundation – VNPF) a honoré Trân Nghia du «Balaban Award», pour son soutien exceptionnel à cette écriture. Une véritable reconnaissance pour cet érudit qui a mené de nombreuses recherches en la matière.
Avant la victoire de Diên Biên Phu en 1954, Trân Nghia a quitté sa province natale de Quang Ngai (Centre) pour faire ses études en Chine. C’est à cette époque qu’il a réellement découvert le chinois et la littérature ancienne. Étudiant en sinologie, le Nôm est ainsi venu à lui naturellement. Comme un lien entre sa langue natale et sa langue de cœur. Il a commencé à se documenter sur les recherches effectuées dans le domaine.
Le professeur Trân Nghia est devenu directeur adjoint de l’Institut Hán Nôm au début des années 1980, et a pris sa tête quelques années plus tard. Il y a initié de nombreux travaux collectifs de recherches, redonnant à cette ancienne écriture un poids qu’elle avait perdu dans le monde littéraire. Outre la traduction et la rédaction d’un grand nombre d’ouvrages, il a écrit quelque 150 articles publiés dans des revues scientifiques : Magazine Littéraire, Recherches en Histoire, Revue Hán Nôm, Sciences Sociales, ou Études vietnamiennes. Parmi eux, bien des travaux ont été effectués en collaboration avec de jeunes chercheurs. «Je veux continuer à inspirer la nouvelle génération. Elle doit poursuivre ces initiatives», partage-t-il.
La relève de la jeunesse
Il semble que les efforts du vieux chercheur commencent à payer. Une poignée de jeunes universitaires expriment de plus en plus le désir de prendre la relève. Ainsi, à un peu plus de 30 ans, Trân Trong Duong est déjà titulaire d’un doctorat dans ce domaine, et il coopère avec d’autres confrères du même âge, Tô Lan, Tuân Cuong, Pham Tuân. «Cette écriture est celle de nos pères. En la décryptant et en la comprenant, nous enrichissons notre bagage culturel et donnons une nouvelle dimension à la préparation de notre avenir», affirme-t-il.
Depuis une dizaine d’années, Trân Trong Duong participe à de nombreuses activités de recherche et de création d’art. Ce jeune calligraphe de style traditionnel a contribué à la naissance de la calligraphie contemporaine au Vietnam avec le collectif «The Zenei Gang of Five» il y a quelques années. Il a étudié beaucoup d’anciens textes bouddhistes traduits en Nôm. En 2009, il a publié un ouvrage de référence sur le zen (importante école bouddhiste), ainsi qu’une traduction de l’ouvrage du médecin et bonze supérieur Tuê Tinh, datant du XIVe siècle.
Récemment, un certain nombre de ses interventions et écrits liés à des événements historiques, à l’architecture, à la signification spirituelle et religieuse de la Pagode au pilier unique (Hanoi), abordés d’un point de vue différent de ceux des prédécesseurs, a attiré l’attention de l’opinion publique. Selon le professeur Trân Nghia, «il est vif d’esprit. C’est son meilleur atout. Il a déjà beaucoup d’expériences pour son âge».
Le trentenaire a par ailleurs l’intention de rédiger un dictionnaire sur les écritures nationales du Xe au XXe siècle, en se basant sur des documents en Nôm. Un travail qui lui prendra certainement plusieurs années.
Trân Trong Duong est déjà reconnu par la Fondation de conservation du Nôm (VNPF), qui lui a décerné le prix du «Jeune chercheur». Une récompense qui encourage ceux qui s’engagent dans une spécialité difficile, et dont l’image est plus que poussiéreuse.
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